2023, 1er prix du concours d’écriture 2023 du Chat Pitre de Roquefeuil (Aude)

2023, 1er prix du concours d’écriture 2023 du Chat Pitre de Roquefeuil (Aude)

2023, 1er prix du concours d’écriture 2023 du Chat Pitre de Roquefeuil (Aude) pour La vie rêvée de Gladys Dubreuil. Les nouvelles primées feront l’objet d’une publication future. Un premier recueil, Parfums de Femmes est disponible.

La vie rêvée de Gladys Dubreuil

Je me prénomme Gladys et j’ai vingt huit ans. Comme chaque début de semaine, je suis arrivée par le train de 7h30. Après une rapide halte dans mon deux pièces près de la gare de Lyon pour y déposer mon bagage, je suis repartie à pieds, longeant puis traversant la Seine par le pont de Bercy. J’aime marcher seule dans la capitale. Je respire, je hume l’air de Paris. Le parfum de la liberté. Le parfum de ma liberté. Seule, aussi loin que je me souvienne, je l’ai toujours été. À l’école déjà. Pas de copine, pas de confidente. Seule. Et plus tard, la même chose. Aucun ami, des collègues de bureaux que je ne fréquente pas en dehors du travail, pas de famille sur place. Mais être seule dans Paris ne me déplaît pas. Personne pour me juger. Personne pour trouver bizarre, voire anormale et même douteuse cette solitude. Ce n’est pas comme à Meyriac, le bled où j’ai grandi. À Meyriac, chacun espionne son voisin, juge sa façon de vivre, ses fréquentations, ses choix de vie. C’est pour cela que j’ai quitté cette petite ville de campagne dès que je l’ai pu. À Paris, je suis libre d’être moi-même, de vivre comme je l’entends, sans avoir à me soucier du regard des autres. Quel bonheur de pouvoir échapper à cette province détestée chaque semaine. J’aurai mille fois adoré rester chez moi, à Paris le weekend. Ne rien faire d’autre que déambuler sur les quais, flâner dans les jardins de Bercy ou des Buttes Chaumont, ou même paresser devant la télé. Mais j’aurai rendu malheureux le seul être qui m’adore. Et que j’aime. Mon père. Un père auquel je me suis accrochée depuis ma naissance. Comme une moule à son rocher, un noyé à sa bouée. Un père dont j’ai siphonné la moindre parcelle d’amour, la plus petite miette d’attention et de bienveillance. Comme un antidote, un talisman censé me protéger de l’indifférence, quand ce n’était pas la malveillance de ma mère. Il faut savoir que Madame Dubreuil, ma mère s’est mariée par dépit. Celui qu’elle convoitait en a préféré une autre. Plus aimable, plus gracieuse aussi, et plus blonde. Son deuxième choix, mon père a payé toute sa vie ce statut de second. Et moi également, par ricochet. Ma mère voulait me prénommer Félicie. Félicie ! Par moquerie. Par méchanceté. En référence à une chanson comique de Fernandel, Félicie aussi. Fort heureusement, Monsieur Dubreuil, mon père, s’est rebellé. Pour la seule et unique fois de son existence, il a tenu tête à sa femme. Refusant pour sa fille une entrée dans la vie sous la raillerie de sa mère. Hélas, le brave homme n’a pas fait le choix le plus judicieux pour le prénom de son enfant. À l’énoncer de mon nom, de la maternelle à l’entrée dans la vie active, j’ai dû m’habituer à décevoir mon monde. Cela n’a été que succession de déconvenues. Gladys Dubreuil. Dès mon patronyme prononcé, chacun s’attend à rencontrer une beauté blonde, un tantinet exotique. L’incarnation de la séduction, de l’élégance. Or, il faut se rendre à l’évidence. Si Gladys, c’est-à-dire moi, si Gladys donc, n’est pas laide, elle n’est pas belle non plus. Je suis plutôt ordinaire. Sans charme particulier. Cela expliquant la déception systématique à la découverte de la personne se cachant sous ce joli nom. Ni blonde, ni brune, ni même rousse flamboyante, je suis châtain. Châtain terne. Mes cheveux ne sont ni raides, ni bouclés. Ils frisotent sans grâce, encadrant un visage rond, sans fossette ni charme aucun. Aucune lueur dans mes yeux marron ne parvient jamais à s’attacher le regard et l’intérêt de mes interlocuteurs. Moi, Gladys Dubreuil je suis un être banal. Personne ne me déteste mais, à part mon père, personne ne m’aime non plus. À l’adolescence, j’ai bien essayé de remédier à cette banalité, me faisant brune, puis rousse, et même blonde. Mais cela n’a pas changé les regards sur moi. Aussi, en ai-je pris mon parti. Je me suis habituée à la transparence, à ne pas attirer les regards. Cela peut même s’avérer précieux. Je ne suis jamais suivie ou interpellée, ni même sifflée dans la rue. Je peux me balader à ma guise dans la capitale sans crainte d’être importunée.

Pour l’heure, je me hâte vers la brasserie Pinel, dans la rue du même nom, où j’ai l’habitude de prendre un café au lait et un croissant chaque matin, avant de retrouver mon boulot de comptable dans un bureau de la place d’Italie. Comptable ! Vous voyez, même mon travail est banal. J’emprunte le boulevard Vincent Auriol, puis la rue Pinel, à gauche et j’entre dans la brasserie Pinel. Je m’installe toujours à la même place, près de la fenêtre. C’est mon poste d’observation favori. De là, je peux voir tout ce qui se passe en face, de l’autre côté de la rue, dans la boucherie Hébrard. Dans la famille Hébrard, on est artisan boucher depuis trois générations. Alexandre Hébrard, le dernier en date, fringant quinquagénaire est veuf depuis deux ans. Son épouse Myriam a trouvé la mort à deux pas de la boucherie, dans un accident de la circulation. Elle revenait de la boulangerie lorsqu’elle est tombée sous les roues d’une voiture. Des passants auraient vaguement aperçu un individu cagoulé sur les lieux. Est-il impliqué ? A-t-il poussé la malheureuse sur la chaussée ? Et pour quelles obscures raisons ? Personne n’a rien vu avec certitude. L’enquête a conclu à un accident. Myriam Hébrard a certainement été prise d’un malaise alors qu’elle marchait sur le trottoir. Elle s’est affalée sur le bitume, devant les roues d’une voiture qui n’a pu l’éviter. Un accident.

Alexandre est veuf. J’aime l’observer ficeler un rôti, emballer et peser des tranches de jambon. C’est mon feuilleton quotidien. Une histoire dont je suis le témoin invisible. La dynastie des Hébrard s’éteindra sans doute avec Alexandre, dans quelques années, car sa seule fille s’est dirigée vers une carrière de journaliste. Un jeune homme fait son apprentissage dans la boutique. Peut-être le futur repreneur ? J’appréhende le moment où mon feuilleton prendra fin. Mais Alexandre est jeune encore. Je refuse de penser à cette échéance. Je préfère me consacrer à savourer l’instant. Je ne connais vraiment que la clientèle du matin. Celle qui vient acheter un beefsteak ou une entrecôte entre huit et neuf heures. Majoritairement des rombières grisonnantes et enrobées. Je n’ai rien à craindre. Non, n’allez pas croire que j’ai des vues sur le boucher. Je suis lucide. Je sais que je n’ai pas les moyens de le séduire. Mais dans mon feuilleton, je suis la seule, l’unique. Celle qui l’observe, le surveille. Je l’aime à distance. Dans ma rêverie, tout est possible. J’imagine notre vie à deux, nos vacances, nos sorties au cinéma, les repas pris en amoureux au restaurant. Tant qu’il ne me connaît pas, le rêve peut continuer. Même si je sais que cela restera un rêve. Je vis une passion platonique et secrète, à son insu. De temps en autres, le midi, je viens déjeuner à la brasserie. Je m’installe à ma place, toujours la même et j’observe les clientes de la mi-journée. Elles sont plus jeunes et plus pressées également. Des courses vite faites entre midi et deux. Aucune ne s’attarde plus que de raison, certaines semblant même attirées par le commis plutôt que par le patron. Femmes stupides ! Stupides mais prudentes. Je ne tolérerai pas qu’il convole à nouveau. Dans mon scénario Alexandre Hébrard reste veuf, définitivement.

Cette après-midi, je ne travaille pas. Il fait très beau. Le printemps pointe le bout de son nez. Mais ce ne sont pas les nombreux parcs de la capitale qui ont ma préférence. Pourtant, j’apprécie de déambuler dans les jardins de Paris. J’adore observer les oiseaux, écouter leurs chants mélodieux, entendre la terre des allées crisser sous mes pas. Mais pour l’heure, j’ai décidé de passer quelques heures à la terrasse de la Brasserie Pinel. Délaissant ma place attitrée à l’intérieur, près de la fenêtre, je m’installe au soleil. Je sors un livre de mon sac pour me donner une contenance. Même si je sais que c’est inutile. Personne ne remarquera ma présence. Si je n’interpelle pas le garçon pour qu’il me serve un thé, la journée s’achèvera sans qu’il ne soit venu prendre ma commande.

J’observe. À l’intérieur de la boucherie une femme brune rit aux éclats, la tête rejetée en arrière. Je ne  la vois que de dos, mais j’aperçois le visage hilare du commis qui répond à son rire. Elle est plutôt grande, les cheveux tombant sur les épaules en belles boucles brillantes. Sur la gauche de la boutique Alexandre ficelle un rôti. Il lève la tête et ébauche un sourire. Événement rare ! Je ne l’ai vu que peu souvent manifester de la joie, même de façon fugace, depuis la disparition de sa femme. Sauf lorsque sa fille vient à la boucherie. Lorsqu’elle lui parle, son visage s’éclaire un peu. De façon très légère. Un plaisir retenu, contenu, douloureux même. Comme s’il ne s’autorisait pas à être heureux à nouveau. Là, c’est différent. Son sourire est léger, mais l’expression n’est pas douloureuse. Alexandre serait-il en train de reprendre goût à l’existence ? La femme l’observe à la dérobée. C’est bien pour lui qu’elle parle, qu’elle rit. Le commis ne l’intéresse pas.  Elle se tourne, regarde au-delà de la vitrine, vers la rue. L’espace d’un court instant, son regard accroche le mien. Un regard déterminé, des yeux pétillants de bonheur. Alexandre est sa proie. J’en suis persuadée. Il est veuf depuis deux ans. Est-il prêt à refaire sa vie ? Il lui tend le sac contenant le rôti par-dessus le comptoir. En le saisissant, elle frôle sa main tout en plantant son regard dans le sien. Il tressaille. Pauvre Alexandre ! Il n’est pas taillé pour affronter une conquérante. Elle ne va en faire qu’une bouchée.

Ce matin, tout en sirotant mon café au lait, j’entends d’une oreille distraite les bavardages du patron. Il a ses habitués qui viennent prendre un expresso vite fait avant de filer vers leur boulot. La politique, la chaleur qui s’installe précocement sur Paris, les Parisiens qui vont peu à peu déserter la capitale pour prendre leurs quartiers d’été en Bretagne ou en Normandie, les touristes qui vont les remplacer. Des commentaires sans intérêt. Et puis soudain trois mots magiques retiennent mon attention, la boucherie Hébrard. J’en oublie de reposer ma tasse que je tiens en suspension quelques instants pour écouter attentivement. Le commis est parti hier. Il est remplacé par une femme qui va servir et encaisser. Une belle plante selon le restaurateur. Une cliente qui cherchait du travail et que le boucher a accepté de prendre à l’essai pour remplacer son commis. Elle ne connaît rien au métier, mais elle est volontaire. Elle commence bientôt.

Depuis un mois, Alexandre a retrouvé le sourire. Son nouveau commis, Suzon a semé joie et bonne humeur dans la boutique. Les rombières grisonnantes et enrobées du début de journée semblent l’avoir adoptée. Elle a un mot gentil pour chacune, demande des conseils pour cuisiner souris d’agneau ou joues de porc. Suzon les flatte. Elle a pris soin de discipliner sa chevelure en un chignon pour paraître soignée. La clientèle apprécie. Les habituées de la pause de midi ont peut-être regretté le commis un temps. Mais les compliments vestimentaires de la nouvelle bouchère les ont définitivement conquises. Pour celle-ci, le bleu du chemisier qui fait ressortir la couleur de ses yeux. Pour celle-là, un exquis foulard tellement assorti à ses cheveux roux. Pour cette autre, une veste tellement chic. Je sais que je ne me suis pas trompée. Je l’ai jugée dès le jour où je l’ai vue rire dans la boutique. Suzon est une conquérante. Elle est maligne. Sa cible, c’est Alexandre. Et pour se l’attacher, elle commence par amadouer sa clientèle. Elle est très forte.

Ce midi Juliette, la fille d’Alexandre est passée à la boucherie. Elle a déjà rencontré Suzon à plusieurs reprises. Les bonjours polis du début se sont transformés en marques de sympathie, puis en signes d’affection.  Juliette fait le tour du comptoir pour embrasser son père, puis embrasse Suzon. Conquise, elle aussi. Suzon ôte son tablier, défait son chignon et secoue ses cheveux qui tombent en rafales sur ses épaules. Elle empoigne son sac à main, dit quelque chose à Alexandre qui lui répond par un sourire. Puis elle sort en compagnie de Juliette. Elles s’en vont bras dessus, bras dessous, discutant et riant comme deux amies. Je les vois passer devant la brasserie, complices. Le piège se referme sur Alexandre. Après la clientèle, Suzon a réussi à apprivoiser la fille du boucher. Je sens que le dénouement n’est plus très loin. La proie est prête à mordre à l’hameçon.

Les jours et les semaines passent ainsi. Suzon est bien installée à la boucherie. Elle est chez elle. Ce soir, le commerce va fermer pour trois semaines de congés. Une première depuis la mort de Myriam, la précédente bouchère. D’après le patron de la brasserie, Alexandre a accepté d’accompagner sa fille dans leur maison de famille en Vendée. La dernière fois qu’il y a séjourné, c’était en compagnie de sa femme. Il n’y est plus retourné depuis le drame. Cette maison contient trop de souvenirs heureux qu’il ne voulait plus convoquer. Il préférait demeurer dans sa tristesse. Mais c’est différent désormais. Il veut bien rouvrir la maison de Noirmoutier. Dans quinze jours, Suzon devrait les rejoindre. Il n’est pas amoureux d’elle. Myriam était et restera son unique amour. Mais sa fille le pousse à se remarier. Il ne doit pas rester seul. Il a le droit d’être heureux à nouveau. Suzon est jolie, agréable. Elle ne compte pas son temps à la boucherie. Et puis Juliette l’aime bien. Elles s’entendent à merveille toutes les deux. Elles font les boutiques, vont au théâtre, au cinéma. Pour Juliette, mieux vaut Suzon que toute autre qui risquerait un jour ou l’autre de mettre le grappin sur son père. Une autre qu’elle n’apprécierait pas autant. Alors pour Alexandre, l’affaire est entendue. Il épousera Suzon. Et c’est à Noirmoutier, dans la maison où il a passé toutes ses vacances de sa naissance à la mort de sa femme, qu’il lui fera sa demande.

Mais Suzon ne se rendra jamais à Noirmoutier. Alexandre et Juliette l’attendront en vain. Après une semaine et demie passée sur l’île, ils rabattront les volets de la maison, fermeront la porte à double tour et emprunteront le passage du Gois à marée basse, direction Paris.

Septembre est un joli mois à Paris. Je ne retournerai plus jamais à Meyriac. Papa s’est éteint en août. Une crise cardiaque. Son pauvre cœur, fatigué de lutter contre la tyrannie de sa femme, usé d’avoir du m’aimer pour deux, a cessé de battre. Après son inhumation dans le caveau de ses parents, je suis partie, définitivement. Sans un adieu à ma mère. J’ai quitté sans regrets cette province exécrée. Désormais, ma vie est parisienne. J’ai repris mes habitudes à la Brasserie Pinel. Je déguste mon croissant du matin en sirotant un café au lait, bien installée à ma place habituelle, près de la fenêtre. J’observe Alexandre qui apprend le métier à un tout jeune commis. Je soupire d’aise. Tout danger est écarté. Les choses sont rentrées dans l’ordre. Le boucher n’est pas prêt à sacrifier son veuvage, tout persuadé qu’il est qu’il porte malheur. Suzon a péri dans un stupide accident. Une bousculade à la station du quai de la gare, sur la ligne 6, dont on ne sait pas par quoi elle a été provoquée. Un mouvement de foule incontrôlé et la jeune femme a été précipitée sur la voie au moment où la rame arrivait. Une enquête a eu lieu. Alexandre et sa fille ont été interrogés. Fort heureusement, ils se trouvaient à Noirmoutier au moment de l’accident. Sinon, le boucher aurait pu être inquiété. Sa femme morte sous les roues d’une voiture et sa promise écrasée par le métro, cela fait de drôles de coïncidences. Et la police ne croit pas aux coïncidences. Moi non plus d’ailleurs. D’autant que les deux accidents ont eu lieu dans le même quartier, à deux pas de la boucherie. Autre coïncidence. Le précédent commis est un suspect sérieux. Déjà, lors de la mort de Myriam, la police l’avait interrogé. La veille de l’accident de la bouchère, ils avaient eu une altercation, Myriam l’accusant d’être trop familier avec la clientèle. Bien que sans alibi, il était en congé le jour du drame et n’avait pu fournir de témoins pour l’heure des faits, le commis n’avait pas été inculpé. Son implication ne pouvait s’appuyer sur le seul désaccord qu’il avait eu avec sa patronne. D’ailleurs, Alexandre avait témoigné en sa faveur. Pour lui, Jérôme était un bon gars. Il ne pouvait pas être coupable. Mais concernant la mort de Suzon, les charges étaient plus sérieuses. Suzon, ne lui avait-elle pas piqué sa place à la boucherie ? Depuis son licenciement, il pointait au chômage. De plus, il avait menacé la nouvelle bouchère, à plusieurs reprises et devant témoins. Et puis il portait volontiers un blouson de sport à capuche, en molleton noir avec une tête-de-mort dans le dos. Un vêtement facilement reconnaissable que les témoins du deuxième accident avaient parfaitement décrit comme présent sur le quai de la station quai de la gare. La police avait interrogé à nouveau les témoins de la mort de Myriam. Pour certains d’entre eux, même s’ils ne pouvaient pas l’affirmer, le sweater à capuche noir présent sur les lieux du drame avait un dessin dans le dos. Mais était-ce une tête-de-mort ? La police disposait désormais de suffisamment d’éléments pour inculper Jérôme des deux accidents requalifiés en meurtres.  Les charges étaient trop importantes. Jérôme avait clamé son innocence tout au long du procès, mais il n’avait pas convaincu. Reconnu coupable avec préméditation des deux meurtres, condamné à perpétuité et n’ayant cessé de clamer son innocence, il s’est pendu en prison.

La vie a repris son cours dans la rue Pinel. Tous les matins, je peux rêver à nouveau, en dégustant mon croissant, sans crainte qu’une nouvelle idylle ne vienne assombrir mon ciel. Ma vie est rythmée par mes rendez-vous secrets avec une existence imaginaire et merveilleuse. Finalement, c’est un avantage de n’intéresser personne.  Cela n’a pas été si difficile de me procurer un blouson identique à celui de Jérôme. Je l’ai reconnu dans la vitrine du magasin de sport de la place d’Italie. Un modèle bon marché et vendu en de nombreux exemplaires comme l’avait souligné sans être écouté, l’avocat de Jérôme. Si je n’étais pas si banale, si transparente, peut-être quelqu’un du quartier m’aurait-il reconnue ? Sur le trottoir au moment où Myriam a chuté sous la voiture qui passait. Et sur le quai de la station de métro. Portant le blouson noir à capuche, orné d’une tête-de-mort dans le dos. Mais désormais tout est rentré dans l’ordre. Alexandre dans sa boucherie et moi à l’observer, à rêver et à l’aimer à distance. Sans crainte que ma rêverie soit interrompue.

Concours d'écriture 2023 du Chat Pitre de Roquefeuil
1er prix du concours d’écriture 2023 du Chat Pitre de Roquefeuil

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